L'entreprise Full-RSEL'entreprise Full-RSE

Fonction RH

• « Chef d’orchestre » d’un collectif à la fois interne et extérieur à l’entreprise, la fonction RH redéfinit l’étendue de son écosystème.

• Détachée, grâce à de nouveaux outils, de ses tâches administratives répétitives, la fonction RH peut se recentrer sur des missions stratégiques.


• Au-delà des aspects strictement professionnels, la fonction RH a désormais la charge du « care »(1), d’une dimension humaine qui dépasse ses missions traditionnelles.

Une fonction RH étendue, « chef d’orchestre » de l’écosystème de l’entreprise

C’est une approche totalement repensée, élargie, de la fonction RH qui a été dessinée : une fonction RH qui prend de la hauteur, au sens propre comme au sens figuré. Au sens figuré car la fonction RH 2030, telle que dessinée par les acteurs présents lors de cette session, assume un rôle qui la fait sortir de ses tâches administratives quotidiennes (dont les praticiens regrettent qu’elles occupent la majeure partie de leur quotidien) pour se recentrer sur un rôle plus stratégique, avec ce que cela implique de vision à long terme. Aussi les RH se voient-ils évoluer vers une fonction de « chef d’orchestre » d’un écosystème intégré, chargé de la gestion du collectif à la fois à l’intérieur et à l’extérieur de l’entreprise. Ils se reconnaissent d’ailleurs mieux sous le vocable « People and organization », dont la traduction française n’est pas clairement identifiée, mais qui leur paraît plus apte à traduire leur fonction dans l’entreprise. Une entreprise qui, elle-même, serait plus ouverte et dont les frontières avec son écosystème seraient plus poreuses : dans un monde où les « ressources humaines », les « people » ne se trouveraient pas uniquement à l’intérieur de l’entreprise, mais constitueraient une constellation de personnes qui y seraient plus ou moins intégrées, la fonction RH ne gère plus une équipe homogène mais des parties prenantes de statuts et d’ancrages géographiques divers. Salariés télétravailleurs, « slasheurs(2)», membres de la société civile : la RH anime en 2030 un collectif plus hétérogène qu’aujourd’hui et agit en facilitateur.


La relation entre l’entreprise et ses collaborateurs se trouve de manière générale repensée, dans une approche plus « partenariale » : le contrat est avant tout un contrat de confiance, dans lequel les contreparties sont réévaluées. Au simple échange « travail contre salaire », se substituent en 2030 des contreparties plus diverses, s’accompagnant d’un rapport de force plus équilibré : en contrepartie d’un salaire, d’une aide à l’atteinte d’objectifs personnels, ou encore de soins plus généraux (dans le cadre de l’« extended care »), les collaborateurs acceptent des systèmes plus flexibles du type « pay as you work » ou « bring your own device(3)». La question de la formation, centrale, appelle encore une réflexion sur le placement du curseur : est-ce à chacun de prendre en main son parcours de formation, ou la responsabilité revient-elle au contraire à l’entreprise (et à la fonction RH en particulier) d’assurer l’«upskilling(4) », le « reskilling(5) » et l’« outskilling(6) » de ses collaborateurs ? Si ces deux approches ne sont pas incompatibles (il pourrait revenir au salarié de prendre en main son parcours de formation, qui serait ensuite assurée par l’entreprise), elles suggèrent dans ce cas de faire porter la responsabilité de son employabilité sur chacun des collaborateurs de l’entreprise, ce qui peut s’avérer contradictoire avec la logique d’« extended care ». La RH assure quoi qu’il en soit là encore un rôle de facilitatrice, d’«enabler(7)», des aspirations de chacun. Dans cette logique, la RH élargit son champ d’action, pour prendre en charge l’Humain dans toutes ses dimensions, sous un angle professionnel comme personnel (sujets sur lesquels les frontières sont perçues comme étant amenées à s’estomper).


Cela implique notamment, dans un monde où la protection et la sécurité assurées par le salariat n’est plus le modèle dominant, et où la place est largement faite à l’autonomie de chacun, de s’assurer de ne pas laisser les plus faibles de côté. Assurer l’inclusion sociale, y compris de populations formellement externes à l’entreprise, apparaît comme un rôle clef de la fonction RH 2030. Cette dimension plus holistique et stratégique de la fonction RH impliquerait, pour elle, de retrouver une place au centre de la gouvernance de l’entreprise, aux côtés du PDG, prenant cette fois de la hauteur au sens propre.

Image de master1305 sur Freepik
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Une fonction RH plus émancipée, libérée des contraintes réglementaires, techniques et administratives

Plusieurs points de tensions ont été identifiés, auxquels la fonction RH devra répondre pour évoluer vers son nouveau rôle dans une entreprise « RSE 2030 ». Principal obstacle identifié à ce stade : les contraintes règlementaires et le droit social en général, qui ne sont pas adaptés à une relation plus « partenariale » entre l’entreprise et ses collaborateurs (alors pris dans une acception large : internes ou externes à l’entreprise). Au niveau de l’organisation de l’entreprise, la fonction RH devra s’être délestée de tâches administratives chronophages, qui accaparent aujourd’hui une part majoritaire de son temps et de ses équipes. Une telle évolution pourrait passer notamment par l’apparition de nouveaux outils, et/ou par une externalisation de certaines tâches. Un obstacle certainement commun à nombre de fonctions de l’Entreprise Full-RSE 2030 réside par ailleurs dans la tension entre les impératifs économiques et financiers d’une part, et les impératifs humains et de RSE en général d’autre part. Afin de répondre à cette tension, la définition et la mise en place d’indicateurs sont rendues nécessaires. Enfin, est mise en avant la nécessité plus générale d’une évolution de la culture de l’entreprise et de l’état d’esprit des différentes parties prenantes : s’inscrire dans une démarche plus partenariale et dans une vision élargie de la fonction RH implique de revoir la nature des relations de l’entreprise avec son écosystème.


La RSE encore largement vue par la fonction RH sous son angle social, laissant l’environnement au second rang

Comme cela était déjà ressorti dans l’étude de l’Institut de l’Entreprise, L’Entreprise post-RSE vue par ses parties prenantes(8), la dimension sociale de la RSE est particulièrement prégnante dans la perception des acteurs interrogés. La dimension environnementale, et climatique notamment, n’est à l’inverse que peu interrogée dans la réflexion sur l’avenir de la fonction RH. Si l’aspect humain et social des « ressources humaines » peut expliquer ce biais, il conviendra d’évaluer dans de futurs travaux la contribution possible de la fonction RH à la lutte contre le changement climatique et la protection de l’environnement en général. Les travaux menés lors de cet atelier ont en revanche fait apparaître une constante : la confiance. La nécessité de consolider la confiance entre RH et salariés, mais aussi entre l’entreprise et l’ensemble de son écosystème.

(1) Care : sollicitude à l’égard d’autrui et les soins qu’on lui donne
(2) Slasheur : personne qui exerce plus d’une profession simultanément
(3) Bring your own device ou « apportez votre équipement personnel de communication » : pratique qui consiste à utiliser ses équipements personnels (smartphone, ordinateur portable, tablette électronique) dans un contexte professionnel.
(4) Upskilling : formation destinée à augmenter les compétences existantes afin de permettre la poursuite du même métier, ou du même domaine d’activité, dans un contexte de mutation du métier.
(5) Reskilling : formation qui est destinée à aider les personnes à acquérir de nouvelles compétences pour changer de métier.
(6) Outskilling : formation des collaborateurs menacés par un licenciement ou l’obsolescence de leur poste, afin de les accompagner dans le développement des compétences et la maîtrise des outils nécessaires pour décrocher un nouvel emploi, auprès d’un nouvel employeur
(7) Ensabler : facilitateur

(8) Sabine Effosse, L’Entreprise post-RSE vue par ses parties prenantes, Institut de l’Entreprise, mars 2020
(9) Voir l’étude ANDRH, Transformation RH, Franck Brillet et Aline Scouarnec, à paraitre en 2022.

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